TROPIQUES TOXIQUES, le scandale du chlordécone
Une longue enquête sur le scandale du chlordécone dans les Antilles françaises. Un album documenté et instructif.
Chlordécone. Un nom plutôt barbare pour ce qui est un véritable poison pour la Guadeloupe et la Martinique. Afin d’améliorer les rendements de la production de la banane et lutter contre la concurrence américaine, ce pesticide cancérogène y a été utilisé très largement entre 1972 et 1993. Il est désormais interdit mais le mal est fait: 800.000 habitants en ont des traces dans le corps, les cas de cancers grimpent et l’environnement est pollué pour des centaines et des centaines d’années. Pourquoi le chlordécone a-t-il continué à être pulvérisé aux Antilles françaises alors qu’il était déjà interdit dès 1976 aux Etats-Unis?
Après avoir signé « Peyi an nou » sur le mouvement migratoire des Antillais institutionnalisé par l’Etat français à travers le Bumidom, Jessica Oublié se penche sur un autre « scandale d’Etat » qu’elle a découvert en 2018 lorsqu’elle s’est installée en Guadeloupe: le chlordécone et les ravages d’une économie productiviste. Le résultat tient en quelque 240 pages extrêmement denses et documentées qui apportent un éclairage parfaitement sourcé, chiffres et témoignages à la clé, en passant en revue les aspects historiques, sociétaux, médiatiques, politiques et juridiques du problème. Même si l’ensemble s’avère tout de même peu digeste, la « thèse » reste intéressante et utile, d’autant que les intervenants sont nombreux – simples citoyens, agriculteurs, associations écologistes, scientifiques, avocats, etc – et que graphiquement les décors de Nicola Gobbi (« Rouge passé ») sont assez variés, avec même quelques photographies ici et là signées Vinciane Lebrun.
Dessinateur: Nicola Gobbi – Scénariste: Jessica Oublié – Editeur: Steinkis – Editeur: 22 euros.