PINARD DE GUERRE

Un profiteur de guerre ravitaille les Poilus en vin. Une petite histoire sans concession dans la grande.

Les bandes dessinées sur la Première Guerre mondiale sont plutôt courantes mais l’angle choisi par Philippe Pelaez (« Un peu de tarte aux épinards », « Puisqu’il faut des hommes ») l’est moins. C’est en lisant, dans une revue spécialisée en histoire, un petit article sur les énormes quantités d’alcool avalées par les Poilus (15.000.000 hectolitres quand même) que le scénariste a eu l’idée de « Pinard de guerre »: l’histoire de Ferdinand Tirancourt, un négociant qui ravitaille en vin les combattants des champs de bataille du Nord de la France.
Ferdinand Tirancourt n’a pas le profil du héros, encore moins celui d’un personnage qui attire la sympathie. Planqué, profiteur sans scrupules et violent avec les femmes, l’homme est a priori détestable malgré le regard cynique qu’il porte sur le conflit et la manière dont sont considérés les soldats. Avec un scénario bien construit, Pelaez réussit pourtant au fil des pages à nous faire changer d’avis sur le bonhomme. Les textes sont incisifs avec des pointes d’argot naturelles tandis que le dessin réaliste de Francis Porcel (« Dans mon village on mangeait des chats » sur un scénario de Pelaez déjà) restitue l’horreur du front. Le dessinateur des « Folies bergère » – qui prenait aussi pour cadre la guerre 14-18 – est tout à son aise pour nous plonger dans l’enfer des tranchées, gueules expressives de Poilus et couleurs sang/vin, terre et poussière en prime.
Avant de suivre Ferdinand Tirancourt dans une deuxième volet intitulé « Bagnard de guerre », un petit cahier documenté et illustré permet de revenir sur le vin au début du XXe siècle, ses spéculateurs et l’alcoolisation excessive.

Dessinateur: Francis Porcel – Scénariste : Philippe Pelaez – Editeur: Grand Angle – Prix: 14,90 euros.

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