LA NUIT DE L’INCA – Tome 1
Le soleil a disparu. Inti, le dieu des Incas, ne s’est pas levé sur le village de Quechita. C’est la panique et Maki le manchot, devient le bouc émissaire. Dépaysement, humour et émotion garantis.
Le soleil s’était couché comme d’habitude ce soir-là sur les montagnes surplombant le petit village inca. Et pourtant le lendemain il répondait aux abonnés absents, semant la panique parmi les habitants. Tous les regards se tournent alors vers Maki le manchot qui, quelques jours auparavant, avait eu la vision de ce qui allait arriver. Pour lui, les ennuis ne font que commencer.
« Le Temple du soleil » d’Hergé n’est pas loin dans les esprits lorsque l’on évoque les Incas et la disparition du soleil. Tout y est: les costumes colorés, les lamas (qui ne crachent pas, eux!), l’importance des dieux et les superstitions. Le dépaysement est garanti. Mais dans « La nuit de l’Inca », la disparition subite du soleil est bien trop longue pour n’être qu’un phénomène astronomique. Si ce n’est une éclipse, qu’est-ce donc?
L’histoire est très intéressante, elle se lit comme un conte avec tout au long de l’album des petites touches d’un humour discret mais efficace. Le décalage entre cette civilisation pré-colombienne et le langage contemporain des Incas – qui parlent comme vous et moi – participent à cette ambiance rigolote. Certes la crédibilité de l’histoire en prend un coup mais qu’importe, on se laisse entraîner gaiement dans l’aventure. D’ailleurs l’humour n’enlève rien au côté dramatique du scénario car comme le note un villageois, « la disparition du soleil, c’est pas rien, quand même! ». Et puis, Vehlmann (« Le marquis d’Anaon » avec Matthieu Bonhomme) en profite aussi pour décortiquer un peu les travers des hommes – la cruauté, la lâcheté, le rejet de ceux qui sont différents – et les dérives auxquelles mènent religion et supersititions.
Graphiquement, Duchazeau tire aussi son épingle du jeu. « La nuit de l’Inca » est original sur bien des aspects: un dessin tout en hachures qui privilégie un élément fort (en général un personnage) au détriment du décor, la plupart du temps inexistant. Le dessinateur parvient en outre à rendre les cases extrêmement lumineuses malgré l’absence du soleil. Dernière remarque, la couverture de l’album avec Maki en pleine chute rappelle les couvertures de « L’incal » de Moebius et Jodorowsky, sur lesquelles John Difool est en train de tomber. Un hommage discret?
La collection Poisson Pilote de Dargaud est décidément une source intarissable de bonnes petites surprises. Suite et fin de « La nuit de l’Inca » dans le prochain tome.