Pierre Veys: « J’aime que les gentils prennent leur revanche »

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Dans « SOS Météo », le scénariste Pierre Veys offre le rôle du méchant au vénérable professeur Mortimer. De plus en plus drôle et mené à un rythme d’enfer, ce troisième volet des aventures de Philip et Francis rend un bel hommage aux héros d’E.P. Jacobs.

Dans ce troisième tome des aventures de Philip et Francis, vous transformez Mortimer en méchant. D’où vous est venue cette idée surprenante ?
Pierre Veys. sosmeteo1.jpg« No more Mr nice guy » dit Mortimer, avant qu’Alice Cooper ne chante ce titre quelques années plus tard. J’aime bien que les gentils, éternelles victimes, prennent leur revanche. D’autant plus que là, Philip ne le fait pas vraiment exprès, puisque sa potion génère bien plus d’effets que ce qu’il avait prévu. D’ailleurs Mortimer est très content quand il entend parler de ses « exploits » en tant que Hyde. Malheureusement pour lui, il redevient comme il était. Tout le monde va pouvoir de nouveau abuser de sa gentillesse. Le pauvre…

Ce « SOS Météo » fait évidemment référence à « SOS météores ». Pourquoi avoir choisi cet album de Black et Mortimer ? Est-ce que tous les albums peuvent être parodiés ?
P.V. Eh bien, pour la référence, ce n’est pas le cas. Les seuls éléments qui viennent de « SOS Météores » sont la machine de Miloch, et une case où Olrik « accueille » Mortimer assis dans un canapé. D’ailleurs, je n’ai pas relu cet album avant d’écrire ce tome. Sinon, j’aurais mis aussi Jean Gabin et Charles Trenet, vous pensez bien. L’important dans cette histoire, c’est avant tout Mortimer, le dévergondé, l’anarchiste, le Spartacus, qui bouleverse l’ordre établi. Je voulais l’appeler « Mortimer se rebiffe » ou « Mortimer contre Mortimer » ou « L’étrange cas du professeur Mortimer ». Ou encore « Mortimer boit frais à Saint-Tropez ».

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Il y a un rythme incroyable avec plusieurs gags par page. Il y a une volonté d’en glisser un maximum aussi bien dans le récit que sur des détails du dessin ?
P.V.
J’aime un certain rythme pour les dialogues, les gags, les surprises, les informations, les changements d’ambiances, de couleurs,… Et il y a plein de choses à découvrir, et à identifier, dans les décors.

Ce rythme soutenu est la raison pour laquelle vous avez évité les longs narratifs chers à E.P. Jacobs ?
P.V.
On peut également bien s’amuser avec les narratifs, mais il faut préparer le terrain. Là, le rythme des dialogues s’en trouverait interrompu. C’est pour cela qu’il y en a surtout dans les cases sans bulles. Le choix s’est fait naturellement, tout le long de l’écriture, et je ne me suis pas forcé à en mettre ou en enlever. De toute façon, je ne me rappelle plus: j’étais en version Mr Hyde quand je l’écrivais.


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En acceptant les défauts de vos héros, vous les rendez moins lisses et beaucoup plus attachants. On a parfois même le sentiment de découvrir ici les vrais Blake et Mortimer…
P.V. Des défauts ? Vous voulez les vexer ? Au niveau des personnages, ça complète ce qu’on apprend dans l’œuvre. Ensuite, ils développent aussi leurs existences en tant que Philip et Francis tout au long des trois tomes. Mais je ne les connais pas personnellement, évidemment. Tout ce que je peux vous dire, c’est que ce sont des voisins bruyants.

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Que pensent les puristes de Blake et Mortimer de votre série ?
P.V. Je ne sais pas. Par rapport à Blake et Mortimer, je pense qu’on peut lire Philip et Francis de la même façon qu’on découvrait Spirou et Fantasio lorsqu’ils étaient en présence de Gaston : leurs comportements sont plus intimes que dans le courant de leurs aventures.

Propos recueillis par Emmanuel Lafrogne

(sur Twitter)

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« SOS Météo », tome 3 de Pierre Vey de Nicolas Barral. Dargaud. 13,99 euros.

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