L’ODEUR DES PINS

L’enquête menée par une Allemande sur le rôle de sa famille sous le nazisme. Un héritage lourd mais un travail de mémoire intime courageux.

« Je ne savais rien », dit une vieille dame entourée de sa famille, un soldat allemand en arrière plan. Telle est la couverture de cette bande dessinée ambitieuse qui plonge le lecteur au coeur d’une famille allemande sur trois générations, de l’avènement du nazisme à nos jours en passant par la reconstruction du pays et la Guerre froide.
« L’Odeur des pins » est le récit d’une enquête de longue haleine menée par Bianca Schaalburg et son fils sur sa famille, ses secrets, ses mensonges et ses dénis. Des réponses évasives sur la période nazie, une photo du grand-père Heinrich portant une croix gammée sur la veste, trois Stolpersteine (des pavés de béton ou de métal posés symboliquement devant les immeubles où habitaient des juifs qui ont été déportés) devant la maison familiale sont le point de départ des interrogations de l’autrice allemande.
Que connaissait vraiment sa famille de l’extermination des juifs? A-t-il été possible de traverser la guerre sans rien savoir? Pouvait-elle ignorer qu’elle habitait la maison de juifs expulsés et déportés? Quel rôle véritable a joué le grand-père Heinrich dans la Wehrmacht? Était-il un nazi zélé ou un suiveur?
Avec patience, obstination et aussi beaucoup de courage, Bianca Schaalburg lève le voile sur son très lourd héritage en mêlant les souvenirs familiaux aux faits historiques. Ces plus de 200 pages au dessin agréable et parfois imagé pour tenter de comprendre l’indicible sont très denses, les allers-retours entre différentes périodes incessants (un code couleur permet néanmoins de s’y retrouver) et les personnages nombreux mais elles regorgent d’informations et de sensibilité. Une grosse annexe illustrée en fin d’album vient d’ailleurs apporter des détails historiques sur les justes, les rescapés, les dignitaires nazis et les villes de Berlin et Riga.
L’album de Bianca Schaalburg est finalement à l’image des fameux Stolpersteine: une façon de ne pas oublier la vérité et de l’assumer, toute en honorant la mémoire des victimes du nazisme.

Dessin et scénario: Bianca Schaalburg – Editeur: L’Agrume – Prix: 26 euros.

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