LES OLIVES NOIRES – Tome 3. Tu ne mangeras pas le chevreau dans le lait de sa mère
Ces olives noires là sont si savoureuses qu’elles se dégustent trop vite.
« Les olives noires » raconte l’histoire de la terre d’Israël il y a 2000 ans à travers le destin d’un enfant qui cherche son papa dont il a été séparé au cours d’un émeute. Une fable magistrale, antique et terriblement contemporaine à la fois.
Gamaliel, toujours accompagné de Josué le rabbin zélote fanatique et de deux Gaulois déserteurs, arrive dans une Jérusalem sous tension, secouée par une vague d’attentats anti-Romains. Il va y faire de nouvelles rencontres comme Moshé, le cuisinier du préfet ou les nains gladiateurs.
Le scénario est sensible, intelligent, les dialogues sont tantôt drôles, tantôt crus, tantôt graves, tantôt philosophiques. Sans détonner, s’enchaînent ainsi des séquences aussi variées qu’un cours de combat au corps à corps, une discussion de femmes sur la sexualité ou une réflexion sur la cuisine kasher. Sfar s’attarde sur la difficulté de partager sa nourriture, son repas, son pays. La présence de Gamaliel et le regard naïf qu’il porte sur ce qui l’entoure permet à chaque fois d’élargir le débat vers une plus grande tolérance.
Sfar évite les discours pesants et grandiloquents sur la foi, il préfère de loin le ton réaliste dans de courts dialogues. « Où veux-tu vivre? » demande-t-on par exemple à Eliaou. « Dans la terre d’Israël ». « Peux-tu l’habiter toute entière à toi tout seul? ». « Mon peuple le peut ». « Non. Tu dois te demander concrètement où tu veux vivre. (…) Ça veut dire sur quelle pierre, dans quelle vallée. Et là, il y a de la place pour les Romains et toi. ».
A travers d’immuables planches de six cases baignées de couleurs chaudes évoquant à merveille la Jérusalem antique, Guibert nous offre un dessin épuré, un trait simple, une ligne claire et surtout des personnages très expressifs qui donne encore plus de profondeur au récit de Sfar. Emotions, frayeurs, interrogations, tout ce qui se passe dans la tête des personnages et bien rendu.
Le problème de ces olives noires là c’est qu’elles sont si délicieuses qu’elles se dégustent trop vite. Le prochain tome nous fait déjà saliver.