LE JOUR DU MARCHÉ

L’Europe de l’Est au début du XXe siècle à travers le regard d’un tisserand qui réalise pour son plus grand malheur que le monde change: la dictature du profit vient de commencer. Un récit d’une grande subtilité.

Ce jour là ne sera pas un jour comme les autres pour M.Mendelman. Le marchand à qui il vendait d’habitude ses tapis a cessé son activité et son successeur ne veut pas les lui acheter. C’est comme si le monde s’écroulait pour ce tisserand juif – et futur papa – dans l’Europe de l’Est au début du XXe siècle.

Un portrait de la communauté juive au début du siècle dernier, le sujet n’est pas des plus vendeurs a priori. Le récit ne respire pas la joie non plus. D’ailleurs la couverture et les planches aux teintes tristes donnent un premier aperçu de l’ambiance. Et pourtant il serait vraiment dommage de passer à côté de cette chronique sociale sur les mutations économiques et ses conséquences sur les hommes. Passionné par l’Histoire, l’Américain James Sturm est déjà l’auteur de quatre récits sur les Etats-Unis dont « Black star ». Pour « Le jour du marché », il s’est notamment aidé de photos, de cartes postales et de dessins.

Pour nous faire ressentir la passion et l’amour du travail bien fait qui animent le modeste tisserand ainsi que l’état d’accablement et de désespoir qui s’empare de lui, Sturm privilégie la lenteur. La narration – principalement en voix-off – est particulièrement posée comme pour mieux laisser Mendelman digérer ce qui lui arrive et nous rappeler par la même occasion que les temps ont changé, que les rythmes d’hier ne sont plus ceux d’aujourd’hui. Le conte de Sturm suscite la réflexion et multiplie les niveaux de lecture. Morale, sans être moralisatrice, « Le jour du marché » est donc une oeuvre riche, d’une grande subtilité. Oui vraiment, il serait dommage de passer à côté.

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