CORPS A CORPS

Le corps reflet de l’âme et non l’inverse. Les personnages que Mardon nous propose de suivre quelque temps en sont la preuve. Une chronique urbaine pleine d’humanité digne de la collection Aire Libre

Sur la couverture, huit personnages se partagent la scène. Huit personnes qui n’appartiennent pas au même cercle de connaissances mais qui sont toutes liées à l’une ou l’autre. Agnès et ses tatouages du bout du monde qui vient de quitter Julien, petit délinquant, rencontre Cyril, doublure voix dans un dessin animé produit par le père «overbooké» de la jeune femme. Le meilleur ami de Cyril, Jean-Pierre Martin, est un secrétaire médical timide mal à l’aise avec les femmes. Régulièrement il croise, Jeanne, mère d’Agnès, droguée aux opérations de chirurgie esthétique.

Les destins se croisent, s’entrechoquent parfois, influencent sans le savoir celui des autres pour créer finalement un récit complet. Grégory Mardon est le chef d’orchestre de cette histoire qui par son principe rappelle certains films comme «Short cuts», «Magnolia» ou même «Pulp Fiction». Mais là où un réalisateur a du temps pour mettre en place sa galerie de personnages, Mardon a tenu le pari en 72 pages seulement.

En un tome, l’auteur de «Vagues à l’âme» et de «Cycloman» raconte une histoire de relations humaines dont la morale pourrait être: pour être bien dans son corps, il faut avant tout être bien dans sa tête. Mais cela, les héros de cette chronique urbaine ne l’ont pas compris et à travers chirurgie esthétique, piercing, boulimie, tatouages ou même l’envie de prendre des coups, ils cherchent à combattre leur mal-être, leur solitude, leur souffrance.

Ces sentiments et les rapports complexes qu’entretiennent les personnages entre eux sont décrits avec une grande justesse. C’est d’ailleurs la grande force de l’album car, n’en déplaise aux amateurs d’action, «Corps à corps» est avant tout une BD d’introspection. On ne s’ennuie poutant jamais car la narration est fluide et les liens qui s’établissent entre les personnages sont amenés de façon toujours très subtile. Le dessin et les couleurs donnent également beaucoup de punch à l’ensemble.

Un album qui mérite donc sa place dans la très bonne collection Aire Libre.

Dupuis

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