ASSASSINE

Une narration maîtrisée et une enquête policière très bien menée qui mélange efficacement surnaturel, folie, machiavélisme et voyeurisme. Un bon polar qui aurait pu être encore plus réussi si le dénouement avait été davantage soigné

Simon Davenport est veuf depuis deux mois et n’a pas encore surmonté cette épreuve. Alors lorsqu’il pense voir, sur une photo publiée dans le journal, son épouse à la fenêtre de sa maison, son entourage s’inquiète pour sa santé mentale. Mais Simon est certain de ce qu’il a vu d’autant que d’autres signes troublants apparaissent bientôt. Il décide donc de mener sa propre enquête.

Difficile de passer à côté d’André Taymans en ce début d’année avec la sortie de trois albums au coude à coude: le 10e tome de « Caroline Baldwin », « La fugitive » avec Eric Lenaerts au dessin, et le one-shot « Assassine » pour lequel il prend le crayon.

Pour le coup, c’est au service du noir et blanc que Taymans a mis son trait pourtant très ligne claire. Le résultat fait mouche: les aplats et les ombres confèrent une ambiance de polar très noir au récit. Le village paumé sous la neige, l’hôtel désert un peu inquiétant, le chien loup qui rôde, autant de détails qui permettent de s’immerger facilement dans le récit. Petit bémol en revanche pour le visage de ses personnages féminins qui ressemblent invariablement à Caroline Baldwin !

En plus de l’atmosphère c’est aussi la manière dont est conduite l’enquête policière qui fait d' »Assassine » un bon polar. Le déroulé de l’histoire est classique mais efficace: les auteurs suivent Simon dans son enquête tout en intégrant des flash-backs évoquant la mort de sa femme. Longtemps, le lecteur hésite entre surnaturel et complot machiavélique. Mais les auteurs ont eu également la bonne idée d’insérer, en plein milieu des planches, des images volées qui semblent tirer de leur contexte et qu’on ne peut alors expliquer. Elles suggèrent ainsi au lecteur une explication plus sordide que ce que l’enquête de Simon laisse d’abord supposer.

Les incertitudes du lecteur durent d’autant plus longtemps que Taymans et Delperdange ont pris le temps de bien développer l’intrigue. L’album fait 80 pages mais le récit en dit beaucoup plus grâce au décalage entre texte et dessin utilisé dans certaines cases: tandis que les bulles racontent quelque chose, le dessin lui est déjà passé à une autre scène. Cela paraît compliqué mais cela se lit en fait très bien.

Malheureusement, le dénouement est trop vite expédié. Tout s’enchaîne rapidement sans que cela soit forcément très crédible et quelques zones d’ombres persistent encore une fois l’album refermé. Dommage car « Assassine » avait tout pour faire un très très bon polar.

Casterman

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