CONFESSIONS D’UN ENRAGÉ
Griffé par un chat enragé à quatre ans, Liam voit sa vie basculer. Entre récit fantastique et initiatique, un one-shot troublant au graphisme impressionnant.
Liam, quatre ans, son grand frère et ses parents vivent à Rabat au Maroc. Mais un jour d’été 1979, le gamin est sauvagement griffé au visage par un chat qui s’avère avoir contracté la rage. La famille décide alors de rentrer en France.
A partir d’une maladie mortelle, endiguée en Europe mais toujours endémique en Afrique et en Asie (entre 40.000 et 70.000 personnes décèdent de la rage chaque année), Nicolas Otero imagine un récit fantastique impressionnant où le petit garçon se retrouve hanté par le chat enragé qui, dans ses cauchemars, finit par lui lancer un défi: le félin se manifestera sept fois, qui seront autant de possibilités pour Liam de le combattre. Au bout des sept épreuves, si le chat l’emporte, il possédera l’enveloppe humaine de Liam pour toujours… Raconté par Liam lui même, le récit est particulièrement sombre et violent, faisant parfaitement ressentir la souffrance perpétuelle du jeune garçon, ses flambées de sauvagerie. Le travail en couleurs directes réalisé par Vérane Otero – la femme de l’auteur qui signe aussi la très belle couverture – est magnifique, les couleurs vives explosant lorsque le fantôme du chat se manifeste en Liam. Des moments que Nicolas Otero (à qui l’on doit les dessins d' »AmeriKKKa » et surtout « Le roman de Boddah » en tant qu’auteur complet) choisit également pour se soustraire à la contrainte des cases.
Histoire de nous faire comprendre le calvaire enduré par les personnes atteintes de la rage mais aussi de souffler un peu, « Confessions d’un enragé » est entrecoupé de planches dans lesquelles un médecin donne des explications scientifiques sur la rage. Des séquences un peu trop bavardes mais qui heureusement n’enlèvent rien à la force globale d’un récit où l’on voit progressivement Liam se transformer littéralement en chat: griffes, yeux, queue, etc… Mais est-on finalement face à une manifestation fantastique de la rage ou plutôt une métaphore du passage de l’enfance à l’âge adulte, avec un adolescent mal dans sa peau et dans la société, éprouvant des difficultés à canaliser ses émotions? La question persiste tout au long de l’album et c’est ce qui rend ce one-shot encore plus troublant.
Dessin et scénario: Nicolas Otero – Editeur: Glénat – Prix: 25 euros.