Festival BD d’Angoulême 2024: le palmarès dévoilé
12 Fauves d’Angoulême ont été remis. « Monica » de Daniel Clowes a reçu celui du Meilleur album. Ont également été remis un Fauve d’honneur, les Prix René-Goscinny et le Prix Konishi.
Le Palmarès Officiel de la 51e édition du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême a été dévoilé. Au cours de cette cérémonie, 12 prix baptisés les Fauves d’Angoulême ont été remis. Le Palmarès officiel met à l’honneur des œuvres publiées en langue française, quel que soit le pays d’origine, et diffusées dans les librairies francophones entre le 1er décembre 2022 et le 30 novembre 2023.
À l’occasion de cette édition, ont également été décernés un Fauve d’honneur à Moto Hagio. La mangaka est une autrice multi récompensée dont la longue carrière est marquée par la diversité – de thèmes, de genres – et une soif absolue de liberté. Elle a révolutionné le shôjo manga au début des années 70.
FAUVE D’OR – MEILLEUR ALBUM: « Monica » de Daniel Clowes (Delcourt).
En gestation depuis six ans, Monica marque le retour de l’auteur multiprimé de Ghost World et David Boring. Livre le plus intime, qui puise dans ses souvenirs personnels, ce récit entremêle le fil de l’histoire de Monica, dont l’abandon fut traumatisant, à des récits courts aux styles narratifs et graphiques différents, de la romance au surnaturel.
FAUVE SPÉCIAL DU JURY (une œuvre qui a particulièrement marqué le jury par sa narration, son esthétique et l’originalité de ses choix): « Hanbok T.1 » de Sophie Darcq (L’Apocalypse).
Née en Corée du Sud en 1976, puis adoptée en France avec ses sœurs, Sophie Darcq étudie la bande dessinée à l’École Supérieure de l’Image d’Angoulême. En 2004, un voyage marquant dans son pays natal, pour retrouver sa famille biologique, nourrit un projet d’envergure, celui de raconter son parcours personnel. C’est cette histoire qui est le sujet de son premier roman graphique… Un émouvant livre mémoire.
FAUVE DE LA SÉRIE (une œuvre destinée à être publiée sur plus de trois volumes, quelle que soit sa longueur totale): « The nice house on the lake T.2 » par Álvaro Martinez Bueno (dessinateur) ; James Tynion IV (scénariste), Traduction de Maxime Le Dain (Urban Comics).
« Tu l’imagines comment, toi, la fin du monde ? » C’est ainsi que Walter, un type assez bizarre, a convié onze de ses ami·e·s dans une luxueuse maison de campagne. Ce huis clos idyllique s’avère être une véritable prison dorée. Le rythme lent des deux tomes révèle un thriller à l’ambiance post ou préapocalyptique, avec ses doses de suspens et de frissons.
FAUVE RÉVÉLATION (l’album d’un auteur ou d’une autrice en début de parcours et qui a publié trois albums maximum en tant que professionnel): « L’homme gêné » de Matthieu Chiara (L’Agrume).
Vincent, seul dans son appartement, se demande ce qu’il pourrait faire : lire, cuisiner, se promener, prendre un bain… Finalement, il préfère ne rien faire et procrastiner en observant un chat sur le rebord de sa fenêtre. Un jour, Julia, la nouvelle et jolie voisine sonne à sa porte pour se présenter, et lui offre un nouveau sujet pour occuper ses pensées. Mais elle engendre aussi une nouvelle difficulté pour Vincent : comme la séduire ? Quoi qu’il fasse, il se sent maladroit. Cela lui rappelle des moments de sa jeunesse, surtout la complicité avec cette petite fille qu’il n’avait pas osé embrasser… Finalement, il lui écrit, elle lui répond et l’invite à passer un week-end à la campagne chez sa cousine Brigitte…
FAUVE DES LYCÉENS: « Le visage de Pavil » par Jérémy Perrodeau (Éditions 2024).
Le scribe Pavil se crashe avec son aéronef à Lapyoza, un village reculé de la péninsule caspézienne, non rattachée à l’Empire qui l’emploie. Contraint de rester plusieurs mois, il étudie les mœurs de cette communauté en acceptant de contribuer à leur quotidien. Un récit d’anticipation de 160 pages qui questionne sur l’acceptation et la tolérance, ainsi que la place des croyances dans une société humaine.
FAUVE – PRIX DU PUBLIC FRANCE TÉLÉVISIONS: « Des maux à dire » par Beatriz Lema, traduction de Jean-Marc Frémont (Éditions Sarbacane).
Les monstres peuvent être le fruit d’une imagination galopante. Mais il arrive aussi qu’ils soient un symptôme d’une maladie mentale. Ils ont volé son enfance à la jeune Vera, dont la mère prétend être harcelée par un démon et sombre peu à peu dans la folie… Un récit singulier, qui témoigne de la capacité de la bande dessinée à traiter d’un thème délicat tel que la santé mentale.
FAUVE PRIX PATRIMOINE (une œuvre appartenant à l’histoire mondiale du 9e art, ainsi que le travail éditorial ayant permis de la redécouvrir): « Quatre Japonais à San Francisco (1904-1924) » par Henry Yoshitaka Kiyama, Traduction de Numata Mutsuko (Onapratut / Le Portillon).
Ce recueil de récits publiés en 1931, inspirés par l’expérience personnelle de l’auteur émigré aux États-Unis en 1904, évoque le choc culturel qu’il a ressenti et sa vision de la société américaine avec une lucidité mâtinée d’humour.
ÉCO-FAUVE RAJA (un album traitant des enjeux écologiques et de développement durable): « Frontier » par Guillaume Singelin (Label 619 / Rue de Sèvres).
Y a-t-il une vie après la vie sur Terre ? Confrontés à l’extinction des ressources terrestres, les humain·e·s sont obligé·e·s de s’inventer une nouvelle frontière, au-delà du système solaire. À travers les destins croisés de trois personnages, Frontier, sous couvert d’un récit d’aventure, nous interroge sur l’éventualité d’une rupture définitive avec notre planète-mère.
FAUVE DE LA BANDE DESSINÉE ALTERNATIVE (meilleure publication non-professionnelle, sans distinction d’origine géographique ou de périodicité): « Aline » par Ik Ben Aline (Hollande).
FAUVE POLAR SNCF VOYAGEURS (un polar en bande dessinée, que celui-ci soit une création originale ou l’adaptation d’une œuvre littéraire): « Contrition » par Keko (dessinateur) ; Carlos Portela (scénariste), Traduction d’Alexandra Carrasco (Denoël Graphic).
FAUVE SPECIAL DU GRAND JURY JEUNESSE EX ÆQUO:
« Bâillements de l’après-midi – Tome 1 » par Shin’ya Komatsu, Traduction de Aurélien Estager (Éditions IMHO).
Au fil de très courtes histoires, Shin’ya Komatsu fait vivre à son héroïne d’incroyables aventures du quotidien où le fantastique fait irruption sans prévenir. Un parapluie qui dévoile le fond de l’océan ou un bonbon au goût de vent, voici quelques-unes des surprises de ce manga paisible et poétique, à contrecourant de la production classique.
« Les Petites Reines » de Magali Le Huche (Éditions Sarbacane).
Alors que la princesse Diana vient de mourir à Paris et que les grandes vacances s’achèvent, tout se joue dans le jardin d’une zone pavillonnaire : Lulu, 8 ans, est amoureux de son blondinet de voisin ; sa grande sœur vit un chagrin d’ado romantique ; et leurs parents se séparent. Trois histoires d’amour contrariées, pour trois âges de la vie, dans la moiteur d’une dernière journée d’été.
FAUVE JEUNESSE: « L’incroyable mademoiselle Bang ! » par Yoon-Sun Park (Éditions Dupuis).
Adaptée d’un roman coréen du XIXe siècle, cette saga trépidante met en scène une petite fille qui choisit très tôt d’être élevée comme un garçon : car ici, ce sont les hommes qui peuvent pratiquer le kung-fu et diriger le pays ! Humour loufoque, dialogues piquants et aventures surprenantes font tout le sel de cette BD aux couleurs douces, savamment concoctée par l’autrice du Club des chats.
Ont également été remis les Prix René Goscinny – Prix du Meilleur Scénario et Prix René Goscinny – Prix du Jeune Scénariste, et le Prix Konishi pour la traduction de manga japonais en français.
PRIX KONISHI (la meilleure traduction en français d’un manga japonais): Odilon Grevet pour la traduction de « Bokko/Stratège T.1 ». Histoire originale de Kenichi Sakemi ; Scénario de Sentaro Kubota ; dessin de Hideki Mori (Vega Dupuis).
En Chine antique, au temps des « Royaumes des combattants », la guerre entre les différents royaumes fait rage. C’est l’époque du clan Mo’Tseu dans lequel un seul homme a la faculté d’arrêter plus de 10 000 combattants. Le secret de la puissance de ses disciples est leur connaissance de la stratégie militaire et leur capacité à défendre n’importe quelle ville ou village dès lors qu’on les laisse prendre le commandement des opérations. Parmi les plus grands disciples de cette école, Ke-ri, expert en combat et en stratégie militaire, est envoyé en mission. Son rôle : organiser la défense d’une ville ayant demandé de l’aide aux hommes de Mo. Ke-ri devra faire face à l’ennemi le plus redoutable qu’il ait jamais connu : son propre clan dirigé par Pei-Ping, dont la conduite semble aller à l’encontre de la philosophie originelle des hommes de Mo.
PRIX RENÉ GOSCINNY – MEILLEUR SCÉNARISTE: Julie Birmant pour « Dalí – 1 – Avant Gala ». Dessin de Clément Oubrerie (Dargaud). Nous sommes en 1930 dans l’atelier de Picasso de la rue de la Boétie. Arrive Éluard, radieux. Dali dîne enfin avec sa femme, Gala. « Éluard n’est pas jaloux ? – Non. », répond le poète. Picasso est sidéré et met en garde son ami : pour lui, Salvador Dali, du haut de ses 25 ans, est un drôle de coco, vieux et jeune à la fois, un peintre au talent sidérant, à l’intelligence vrombissante, prêt à tout… Et Picasso de croquer Dali en chat Mephisto, un chat qui prend vie, se frotte aux jambes d’une Gala qui se baisse et le caresse, et le chat aussitôt de l’emmener avec lui dans son passé, sa jeunesse, et pour commencer à Figueras, ville de Catalogne.
PRIX RENÉ GOSCINNY – JEUNE SCÉNARISTE: Simon Boileau pour « La Ride ». Dessin de Florent Pierre (Dargaud).
Une « ride » – à prononcer (« raïde »), bien sûr ! – c’est une balade en vélo. Simon et Florent racontent la première impulsion, celle qui donne envie de larguer les amarres (pour une durée déterminée) et expérimentent qu’« on ne fait pas un voyage, c’est le voyage qui nous fait », comme l’a écrit l’immense écrivain voyageur Nicolas Bouvier. Un voyage en vélo façon buddy movie et pieds nickelés, de Paris à la Bourgogne, le tout en 5 jours, c’est aussi une manière d’aborder le territoire différemment, et de se retrouver un peu au bout du chemin !