VILLE AVOISINANT LA TERRE
Quand un habitant de Beyrouth rentre chez lui, il se rend compte que son immeuble a disparu. Une métaphore, graphiquement superbe, sur la guerre civile du Liban qu’il a vécue.
Comme tous les jours, Farid Tawil prend le bus pour rentrer du travail, dans un quartier de Beyrouth. Mais ce soir là, planté devant ce qui devrait être son immeuble, il constate avec stupeur que celui-ci a disparu! Sa première oeuvre, « Ville avoisinant la Terre », a reçu le Prix du meilleur album en langue originale au Festival international de la bande dessinée d’Alger en 2012 et l’on comprend très vite pourquoi. D’abord peintre – il a 17 ans quand il expose ses premières toiles à l’International Art Gallery de Londres -, puis caricaturiste et illustrateur, Jorj Abou Mhaya signe en effet de superbes planches où les personnages (principaux ou simples figurants) ont un réalisme et une expressivité incroyables, aux belles nuances de noir et blanc. Graphiquement séduisant, l’album finalisé lors d’une résidence à la maison des auteurs d’Angoulême, déroule une histoire assez dingue qui retranscrit en fait un peu de la folie qui s’est emparée de Beyrouth durant la guerre civile. On suit ainsi un héros tout ce qu’il y a de plus ordinaire qui a perdu tous ses repères, on y y croise un transsexuel philosophe, une foule hystérique tueuse de chiens, un révolutionnaire manipulateur et un Batman obèse dans une ville devenue une sorte de Gotham city. Métaphore de la guerre civile libanaise que Jorj Abou Mhaya a connue puisqu’il est né à Beyrouth il y a 40 ans, « Ville avoisinant la Terre » parle donc avec une poésie touchante de se sentir étranger dans l’endroit dont on est pourtant originaire et qu’on continue d’aimer…
Dessin et scénario: Jorj Abou Mhaya – Editeur: Denoël Graphic – Prix: 17,90 euros.