POURQUOI J’AI TUE PIERRE

Un récit autobiographique grave et sensible sur le thème de la pédophilie.

Elevé par des parents baba cool aux moeurs plutôt libérés, Olivier a une vie un peu trop olé-olé pour ses grands-parents qui compensent avec une éducation stricte et pieuse. Sa rencontre avec Pierre, un « curé de gauche » joyeux et bon vivant, va bouleverser sa vie. Au fil des camps de vacances, se noue entre eux une vraie amitié et l’été de ses 12 ans aurait pu se dérouler comme les autres. Mais cette fois là, Pierre, son ami, son « héros », lui demande de toucher son corps…

« Pourquoi j’ai tué Pierre » n’est pas le récit d’une vengeance, d’un crime commis en représailles de cet épisode douloureux. Le « j’ai tué Pierre » n’est que symbolique – allusion au « tuer le père » du complexe d’Oedipe de Freud. Mais il n’en perd pas moins de sa force, au contraire.

L’ouvrage est autobiographique et pour mettre en images le traumatisme subi, Olivier Ka a fait appel à son ami Alfred avec qui il a déjà réalisé « Monsieur Rouge » (Ed.Petit à Petit). Olivier n’a pas été violé mais parce que le geste est venu de quelqu’un en qui il avait une totale confiance, il est apparu plus affreux encore, comme un geste de trahison. Bien que mûr pour son âge, Olivier n’était qu’un enfant sans défense, donnant tout sans restriction à son ami. La chute n’en est que plus rude. C’est ce que raconte cette bande dessinée d’une centaine de pages, « aussi efficace qu’une psychanalyse » de l’aveu même du scénariste.

Pour nous, c’est un choc. De par le thème d’abord, la pédophilie n’étant pas un thème qu’on a l’habitude de lire en bande dessinée. De par son traitement ensuite: si le dessin est pudique et tout en subtilité – coloré et lumineux pour les moments de bonheur, sombre et hachuré pour les instants d’angoisse -, les mots eux sont justes mais crus. Ka en profite aussi pour régler ses comptes avec la religion.

Le coup de théâtre final – aussi imprévu pour nous que pour les auteurs – vient asséner un dernier coup. Comme Alfred qui assiste en spectateur à ce qui se passe, nous sommes pétrifiés. Olivier vient d’achever Pierre.

Delcourt

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