HEAVY LIQUID
Dans les pas d’un camé chargé de retrouver une artiste qui sculptera une oeuvre d’art à base d’une mystérieuse drogue. Un thriller d’anticipation au graphisme hallucinatoire. A découvrir.
« Heavy Liquid » est une sorte d’ovni, un album de 256 pages à la couverture flashy tendance psychédélique. L’histoire ne l’est pas moins: en 2075, un jeune drogué au heavy liquid, pourchassé par des trafiquants, se voit confié une mission par un collectionneur: retrouver une jeune artiste à qui il voudrait confier la réalisation d’une sculpture à base de ce drôle de métal. « S » (c’est le nom de notre héros) part donc sur la piste de cette jeune femme qui n’est autre que son ancienne petite amie.
Contrairement à ce que son nom laisse supposer, Paul Pope n’est pas le pape de la bande dessinée mais c’est tout de même une star de la BD alternative américaine travaillant aussi bien pour les éditeurs US (il est l’auteur de « Batman year 100 », « THB », « Escapo », « 100% ») que pour les magazines japonais de Kodansha. Rien d’étonnant donc que les planches évoluent quelque part entre le comic, la bande dessinée franco-belge et le manga.
Dans un style très particulier donc où le trait épais et les ombres affirmées remplissent les cases en bichromie (avec différentes intensités de rose et de bleu), Pope nous raconte la fuite en avant d’un type désabusé qui physiquement lui ressemble d’ailleurs beaucoup. Le cadre futuriste, plutôt sordide et violent, est plein de petites trouvailles comme la lentille qui permet de se connecter (« s’emmailler ») sur une gigantesque base de données, le traducteur portatif instantané, le vélo intermétro qu’on peut ranger dans le placard en un tour de main ou la possibilité de faire New York – Paris en 30 minutes.
Sans être une suite de délires hallucinogènes, l’intrigue a tout de même tendance à s’éparpiller un peu et c’est là son point faible. Longue course-poursuite à travers les rues de New York pour échapper aux « clowns » qui veulent faire la peau à « S », retrouvailles avec son ancien amour pour clore sur une fin inattendue qui révélera au lecteur l’origine et les propriétés de cet heavy liquid que l’on peut se couler dans l’oreille. L’album aurait gagné à plus de concision mais il est vrai que le récit est d’abord paru aux Etats-Unis en cinq épisodes.
– Dargaud