CEUX QUI ME RESTENT
Le voyage d’un veuf à la recherche de sa fille disparue. Sauf qu’elle est à ses côtés mais qu’il ne la reconnaît plus. Un album émouvant au sujet pourtant difficile: la maladie d’Alzheimer.
Florent est un jeune veuf de 39 ans, père d’une petite Lilie de cinq ans. Mais après l’enterrement, sur le chemin du retour, la fillette disparaît inexplicablement sur le ferry. A moins qu’en réalité Florent soit en train de chercher quelque chose qui n’existe plus…
Le sujet choisi par Damien Marie (« Ceci est mon corps », « Dans mes veines ») – la souffrance d’un malade d’Alzheimer tentant en vain de rattraper des lambeaux de souvenirs qui s’envolent inexorablement – était du genre risqué et trouver le meilleur moyen de le mettre en images l’était tout autant. Pari réussi pourtant car « Ceux qui me restent » dégage une sensibilité poignante.
Si la quatrième de couverture n’avait pas vendu la mèche (« Voyage en Alzheimer » nous dit-on) on aurait été bien loin de se douter avant un bon tiers de l’album de ce qui se tramait réellement. La maladie est d’abord vue entièrement à travers Florent et comme les images fugaces qui se bousculent dans sa tête, les planches semblent décousues, en vrac même. C’est plus tard que ces fragments de mémoire sont entrecoupés de scènes du quotidien le montrant entouré de sa fille ou du personnel médical. On découvre alors que la souffrance du malade rejoint celle de ses proches, impuissants. La sobriété du dessin de Laurent Bonneau (« Douce pincée de lèvres en ce matin d’été », « Borderline ») est bien vue également. L’absence de décors au profit de larges aplats colorés souligne que Florent ne s’accroche qu’à des bribes de souvenirs, détachés de leurs environnements spatio-temporels. Un « voyage en Alzheimer » dont on se souviendra…