CANICULE
Un gangster vient se cacher avec son butin dans une ferme habitée par une brochette de dingues au bord de l’implosion. Une très bonne adaptation du roman de Vautrin.
Il fait chaud, très chaud cet été là dans la Beauce. Des flics et des gangsters aux basques, un Américain en costard enterre un magot dans un champ à proximité d’une ferme isolée. Mais ce que le braqueur ignore, c’est que la ferme en question est une prison qui s’ignore, un modèle réduit de l’enfer: Ségolène la folle nymphomane, Horace la brute qui va reluquer les campeuses d’à côté, sa femme Jessica pétrie de haine, Socrate l’alcoolo couard, Gusta la vieille au bout du rouleau et Chim le gamin battu et délaissé…
Tiré du polar aussi décapant que décalé de Jean Vautrin, paru en 1982, « Canicule » est d’une noirceur impitoyable. Avec des dialogues ciselés, un trait fluide et un travail sur les couleurs pertinent, Baru (L’Autoroute du Soleil, de Quéquette Blues, « Fais péter les basses, Bruno! ») s’est emparé avec jubilation de cette ambiance oppressante et malsaine et de ces personnages tous plus horribles les uns que les autres, déglingués par les pulsions et les frustrations en tous genres. La France profonde a une sacrée gueule et l’on sent la marmite prête à exploser au milieu de ce huis-clos psychotique. Evidemment ça ne rate pas. Et même si le Grand Prix d’Angoulême 2010 a forcément dû faire quelques ellipses par rapport au roman, s’il n’a pu insister sur la cupidité des hommes face à la beauté de la nature, il a su dresser rapidement et efficacement les profils pathologiques de cette famille de dégénérés et fouiller l’âme humaine en général.
D’autres romans de Vautrin, après Canicule, seront adaptés chez Casterman.