BLACK OP – Tome 1
Comment dans l’Amérique tranquille contemporaine, la CIA va-t-elle aider la mafia russe à renaître? Une très bonne surprise pour cette nouvelle série d’espionnage qui lance un personnage principal convaincant.
« Au cœur de l’empire américain… Quand la CIA aidait la mafia russe à renaître. » L’accroche en couverture est alléchante pour cette nouvelle série d’espionnage lancée en grande pompe. Il faut dire qu’elle est scénarisée par Desberg, auteur de séries à succès comme « Le Scorpion » et « IR$ ». Cette fois, c’est à la CIA qu’il s’intéresse.
Elevé dans la haine des communistes – parce que, lui a-t-on répété, ils ont tué son père – Floyd Whitman entre à la CIA. Son premier poste, en 1965, est en Inde, terrain privilégié de la guerre froide, où il entretient des relations étroites avec la mafia russe, considérée comme un moyen de combattre le communisme de l’intérieur. Puis en 2003, on retrouve Whitman en Floride. Il enquête sur une magouille politique où l’élection d’un président républicain serait soutenue par… la mafia russe.
Faire du neuf avec une recette aussi classique que le récit d’espionnage du temps de la guerre froide et les manipulations politiques relève d’un pari osé. Et pourtant la sauce prend. Car Desberg ne se contente pas de nous lancer dans une intrigue pleine de rebondissements. S’appuyant sur le dessin à la fois réaliste et expressif de Labiano – lui aussi très porté sur l’Amérique (« Dixie Road », « Mister George ») -, le scénariste prend le temps de dresser un portrait fouillé de son héros: son enfance, ses amours, ses premières armes au sein de la CIA. C’est d’ailleurs l’occasion de nous montrer, en passant, le conditionnement systématique de l’Américain moyen contre le méchant communiste. Mais « Black Op » nous embarque aussi dans l’Amérique contemporaine: un pays conservateur où la mafia russe est devenue le premier groupe criminel du pays. Entre les deux parties du récit, Floyd Whitman a considérablement évolué: le jeune homme patriote et plein d’illusions en 1965 apparaît nettement plus critique et désabusé en 2003. Que s’est-il passé pendant cet intervalle de 40 ans? Quel lien y a-t-il entre les mafieux russes d’hier et ceux d’aujourd’hui? Autant de questions encore sans réponse qui éveillent grandement l’intérêt du lecteur. Desberg a bien joué.
Avec une construction originale de son récit, il prouve qu’il est encore possible d’innover dans les récits d’espionnage.