Festival d’Angoulême 2023: Bastien Vivès au coeur d’une polémique

Une pétition réclame la déprogrammation d’une exposition du dessinateur de « Lastman », accusé de banaliser et faire l’apologie de l’inceste et de la pédopornographie.

L’exposition «Dans les yeux de Bastien Vivès», programmée dans le cadre du 50e Festival international d’Angoulême (26 au 29 janvier 2023), fait déjà parler d’elle mais l’organisation de la manifestation et le dessinateur lui-même s’en seraient bien passés: une pétition en ligne sur MesOpinions, dénonçant «la banalisation et l’apologie de l’inceste et de la pédocriminalité» et exigeant le retrait de l’exposition, a déjà recueilli plus de 99.0000 signatures.

Elle a été lancée par Arnaud Gallais. Dans le viseur du fondateur du mouvement BeBrave France (qui milite contre l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants) ainsi que des féministes, des oeuvres et des propos de l’auteur de « Lastman » (Prix de la série du Festival d’Angoulême en 2015) ou de « Polina » (Grand Prix de la critique ACBD 2012).

Une autre pétition (près de 2.500 signataires) a été lancée sur change.org.

Parmi les albums incriminés: « La décharge mentale » dans lequel le père, la mère et leurs trois filles mineures ont des rapports sexuels, «Une soeur» où un garçon de 13 ans a des relations sexuelles avec une ado de 16 ans, ou encore « Petit Paul » (retirée de plusieurs librairies à sa sortie, notre article du 25/09/2018) où un garçon au sexe énorme suscite le désir de sa sœur, son institutrice et sa prof de judo.

Les pétitionnaires mettent aussi en avant des propos tenus par Bastien Vivès dans différentes interviews comme celle donnée au site Mademoizelle en 2017: « Moi déjà, l’inceste ça m’excite à mort. Pas celui de la vraie vie, mais celui raconté, je trouve ça génial. Tous ces trucs-là font des histoires incroyables. Quand tu transgresses, quand tu fais quelque chose que t’as pas le droit de faire, c’est agréable à lire ».

La ministre de la Culture Rima Abdul Malak a estimé que «certains propos (…) ne sont pas acceptables», ajoutant qu’on «ne peut pas réduire cet auteur à deux bandes dessinées et quelques phrases dites en interview».

Certains auteurs de BD ont aussi pris position dans le débat: la dessinatrice Emma (dont le trait avait été violemment moqué en 2017 par Bastien Vivès) a appelé sur Instagram le monde du 9e Art à se « prononcer clairement, publiquement et visiblement sur ce personnage et ses productions illégales » tandis que Boulet a déclaré sur Twitter que « Vivès tient des propos abjects, se comporte comme une merde sur les réseaux et il a fait des dessins à gerber ». A l’inverse, Catel a salué sur Instagram « l’œuvre de Bastien, dans son originalité et sa complexité, qui ne peut être ni réduite ni détruite par des esprits puritanistes » et Jean-Marc Rochette a dénoncé sur Facebook les agissements d’une « meute » qui « collent au pilori sans procès ».

Le principal intéressé a expliqué avoir «reçu beaucoup de menaces sur les réseaux» depuis « Petit Paul ». «Non, je ne suis pas pédophile et non, ce n’est pas mon fantasme. Si on veut lire honnêtement mes oeuvres, on s’en rend compte facilement», a-t-il déclaré au Parisien.

Quant au Festival international de la bande dessinée d’Angoulême, on assure que l’exposition aura lieu malgré le vent de colère. « Au nom de qui et de quoi ce ne serait pas le cas ?, interroge Franck Bondoux, l’organisateur, sur Charente Libre. À ce que je sache, Bastien Vivès n’est mis en cause d’aucune façon. Il n’y a rien à reprocher à cet auteur, le plus talentueux de sa génération, que le festival a suivi dès ses débuts. »

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