Nicoby: « Cet album est né deux fois »
Déjà parues en 2007, les histoires de paternité de Nicoby ont été réécrites, redessinées et colorisées pour cette nouvelle version. « Une vie de papa » ajoute même un chapitre supplémentaire tout aussi drôle où l’on retrouve Bazile dix ans plus tard.
Comment est né cet album, qui rassemble des histoires déjà parues en 2007 et d’autres totalement inédites ?
Nicoby. Cet album est né deux fois. La première, c’était il y a dix ans chez 6 Pieds sous terre. L’album, assez confidentiel, s’appelait « Chronique Layette ». C’était un de mes premiers livres. À l’époque, j’étais un jeune papa, j’avais commencé à prendre des notes et à dessiner les premières pages en temps réel alors que je découvrais cette nouvelle paternité. Dix ans se sont passés et « Chronique Layette » restait un album que j’aimais beaucoup, mais dont le dessin me sortait un peu par les yeux à cause de ses nombreuses maladresses. Entre temps, j’avais développé plusieurs projets avec cet avatar comme personnage principal. Mon dessin et ma représentation s’étaient un peu « calés ». C’est pour ça que j’ai eu très envie de dépoussiérer ce livre pour lui donner une deuxième naissance.
Réécrire et redessiner vos planches s’est immédiatement imposé ?
N. C’était d’une part un problème de dessin et aussi parce que je ne suis plus dans le même état d’esprit par rapport à ma vie de parent. Je suis complètement incapable de raconter des histoires de paternité toute fraîche alors que dix ans se sont passés. Même si les gags sont en partie identiques, c’est vraiment un nouveau livre.
Quels sont les principaux changements par rapport aux planches d’origine ?
N. Le principal changement, c’est l’apport de la couleur qui donne un souffle nouveau à l’ensemble, mais le dessin est aussi plus élégant, moins brouillon. Et il y a le regard distancé dix ans après qui était très important pour moi. Il place le livre dans cette perspective de chronique familiale qui s’étale dans le temps. On y découvre le personnage de la petite sœur qui ajoute un souffle supplémentaire au récit. Elle s’est tellement bien mise en place qu’elle reviendra sûrement !
Vous abandonnez également le noir et blanc pour la couleur. Est-ce un choix artistique ou plutôt éditorial ?
N. C’est à la fois un choix artistique qui donne à « Une Vie de Papa » un côté plus chaleureux et joyeux, et d’autre part un choix éditorial dans le sens où il n’était pas possible de faire ce livre en couleur à l’époque chez 6 Pieds sous terre.
Cela doit être un exercice particulier de retravailler sur ses planches dix ans plus tard ?
N. Un tour de machine à voyager dans le temps. C’est un exercice plutôt amusant dès lors qu’il est exceptionnel. Ça permet de corriger des erreurs qu’on a laissé passer la première fois. Une chance qu’on n’a pas forcément dans la vie… Ça fait aussi remonter quelques souvenirs, en redessinant une page, il arrive que reviennent en tête les préoccupations qu’on avait la première fois.
Vos premières histoires racontent un papa un peu déboussolé par son nouveau rôle de père. Les plus récentes décrivent un papa cette fois dépassé par son fils de 10 ans. Cela vous amusait de montrer qu’une vie de papa n’est jamais facile ?
N. C’est vrai, ce n’est jamais facile ! Ma façon de raconter fonctionne sur un parti pris d’autodérision, mais je n’ai pas eu tellement à forcer le trait. Il y a quelques années, je m’amusais de l’incapacité de mes parents à comprendre les rudiments d’informatique qui me paraissaient évidents. Aujourd’hui, je regarde ébahi mon fils redonner ses couleurs à un Rubik’s cube. Et ce n’est qu’un début !
L’épilogue « 10 ans après » ne contient qu’une vingtaine de pages. Vous n’avez pas été tenté d’en faire davantage pour donner naissance à un véritable nouvel album ?
N. Cet épilogue fonctionne comme un chapitre supplémentaire. Il a la densité de chacun des autres chapitres. Je l’ai bâti comme une sorte de bonus. Mais, je serai très content de développer ces récits de chronique familiale dans de prochains livres. Ce ne sont pas les idées qui manquent.
Propos recueillis par Emmanuel Lafrogne
(sur Twitter)
« Une vie de papa » par Nicoby. Dargaud. 14,99 euros.