Nathalie Berr: « Une histoire rocambolesque et historique »

Situer ce polar où se mêlent des anarchistes et la fameuse Brigade du Tigre dans le Paris inondé de 1910 était une brillante idée. La dessinatrice Nathalie Berr l’a concrétisée en créant une ambiance un peu angoissante sur des planches très souvent remplies d’eau.


naufragesmetropolitain1.jpgAprès le troisième et dernier tome de « Nous, Anastasia R. », vous enchaînez avec une nouvelle série avec le scénariste Patrice Ordas. Vous aviez surtout très envie de poursuivre votre collaboration ou avez d’abord été séduite par son scénario ?
Nathalie Berr. Les deux ! J’avais absolument envie de continuer avec lui parce que nous avons des atomes crochus, ce qui n’est pas si fréquent dans ce métier. On se comprend si bien que cela ressemble presque de la télépathie. C’est très agréable, car c’est un homme qui a beaucoup de culture et propose des scénarios toujours bien ficelés. Cela déclenche toujours chez moi des images immédiates, des personnages, des situations.



Qu’est-ce qui a vous plu dans « Les naufragés du métropolitain »?
N. B. C’est à la fois une histoire rocambolesque et historique. Au niveau du dessin, c’était surtout une espèce de défi avec toute cette eau. Je me demandais si j’en étais capable. La question reste posée… 



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L’histoire se déroule en effet pendant l’importante crue de la Seine de 1910 avec beaucoup de planches de nuit et sous la pluie…
N. B. C’était difficile, car il ne fallait pas trop assombrir les planches ou les rendre trop sinistres. Il fallait essayer de charmer le lecteur avec une nuit un peu angoissante, mais pas trop. Il avait aussi cette pluie avec ces innombrables reflets, ces gouttes d’eau,… Cela m’a aussi permis de découvrir qu’il y avait des pavés en bois à l’époque à Paris et qu’ils sont tous remontés à la surface. C’est pour cela qu’on voit des rues recouvertes de cubes.

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On sent un vrai travail sur l’éclairage. Cela passe par une collaboration très étroite avec le coloriste Sébastien Bouet ?
N. B. Absolument. Nous sommes une équipe. Scénariste, dessinateur, coloriste, éditeur, graphiste, imprimeur ou vendeur, on se passe le relais pour la star qui est l’album. Avec Sébastien, on a discuté un long moment pour le mettre dans l’ambiance et lui montrer que l’eau était le personnage principal de cette série. L’invasion de Paris par cette marée était quand même assez affolante ! Après un ou deux essais, il a très vite compris et a fait marcher sa sensibilité habituelle. La difficulté avec des gens comme Sébastien ou comme moi, c’est de ne pas trop donner d’indications pour ne pas bloquer la création.



Cette liberté, c’est ce que vous offre Patrice Ordas ?
N. B. Complètement. Il est très cool. S’il manque une case ou qu’il y en a une de trop, je lui explique ou lui montre directement le crayonné. Libre à lui de le modifier si cela ne lui plait pas. Mais en général, il l’accepte tel quel. C’est très agréable.

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Les naufragés du métropolitain fait revivre le Paris du début du siècle dernier. C’était excitant ?
N. B. J’adore les vieilles voitures et cette époque où commence ce qui va devenir le Paris actuel. C’est une période qui annonce quelque chose de chouette et qui va vers le beau, malgré la guerre qui s’annonce.

Quelles ont été vos principales sources documentaires ?
N. B. J’ai utilisé internet, mais aussi de vieux albums de famille très lourds avec des photos daguerréotypes. On y voit des personnages improbables. Je m’en étais aussi servi pour « Anastasia ». On y découvre un Paris un peu campagnard. J’espère avoir réussi à faire sentir ce côté campagnard de Montmartre, avec ses chemins de bois et ses poules.

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Le deuxième tome s’inscrira dans la même tonalité ?
N. B. Concernant le graphisme, cela serait un peu dangereux de ne pas poursuivre dans la même veine. L’inondation va aller en s’accentuant donc encore plus d’eau et de noirceur. Par contre, pour le scénario, il y a des changements qui m’ont beaucoup plu. Après avoir présenté les personnages et leurs roublardises, le deuxième tome va les rendre plus réels. L’histoire va s’accélérer.

Propos recueillis par Emmanuel Lafrogne

(sur Twitter)

Les naufragés du Métropolitain », tome 1 par Patrice Ordas et Nathalie Berr. Grand Angle. 13,900 euros.

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