MA REVERENCE

Deux losers attachants mettent sur pied un braquage « humanitaire ». Une chronique sociale drôle et touchante. Un album à ne pas rater.

La trentaine désabusée, Vincent traîne son mal être quelque part en France. Après avoir promis à Rana, avec qui il a eu un enfant en Afrique, de revenir, il échafaude un plan avec son ami Gaby Rocket, un fan des années yéyé grande gueule et ingérable: braquer sans violence et « pour la bonne cause » un fourgon blindé…

« Ma révérence » c’est l’histoire d’un braquage qui n’en est pas un et de deux losers qui ne le sont peut-être pas tant que cela. C’est aussi une histoire formidable, entre tragi-comédie et polar, et une narration parfaitement fluide alors que Lupano se lançait sur un terrain glissant avec ce récit entremêlé de multiples flashbacks, de petits bouts d’explication par ci par là sur le passé de ces deux braqueurs du dimanche. Certes la préparation même du braquage à base de « bluff, de violence simulée et de projet humanitaire » – dont on peine à imaginer une issue heureuse vu l’association de malfaiteurs…- se trouve diluée dans ces 128 pages mais on comprend vite que là n’est pas l’essentiel.

« Ma révérence » est avant tout une chronique de la France d’aujourd’hui inspirée du passé de Lupano qui a travaillé dans les bars et les boîtes de nuit pendant 15 ans et a ainsi rencontré « des personnes aux parcours de vie vraiment étonnants » et « vécu pas mal de situations insolites »… Des secrets de famille, drames et autres blessures du passé, il a créé une fiction à la fois authentique et drôle. Le scénariste d' »Alim le tanneur » et de « Le Singe de Hartlepool » (Prix 2013 des libraires de bande dessinée ») s’est ici associé avec Rodguen qui travaille dans l’animation pour Dreamworks à Los Angeles. Son trait vif donne à ses personnages une expressivité qui contribue à rendre cet album très touchant. Une belle réussite.

Delcourt

Share