CHESS – Tome 1. Tu n’es qu’un pion
Dans un futur proche, Chinois et arabes dominent le monde. Une intrigue encore floue mais qui promet d’être dense.
Etonnamment, mieux vaut avoir commencé par lire le dos de la couverture afin de comprendre le contexte géopolitique de ce futur proche car ce dernier n’est jamais clairement explicité durant ce tome d’ouverture: depuis le 1er février 2019, date à laquelle un astéroïde de 3km de diamètre a percuté la Terre, les États-Unis n’existent plus. Le monde se partage désormais entre le Moyen-Orient et le Nouvel Empire Chinois qui entretiennent des liens tendus, essentiellement basés sur l’échange de pétrole arabe contre de l’eau chinoise. Le mercenaire Chess doit, pour ses commanditaire arabes, accompagner des rebelles ouïgours dans le Xingjiang chinois pour y détruire une base militaire. Mais la mission ne va pas se passer comme prévu…
L’intrigue s’annonce complexe, à la mesure des stratégies politico-économiques qui semblent régir ce nouveau monde. Sylvain et Bruno Ricard ont d’ailleurs construit leur scénario autour de la métaphore du jeu de stratégie, les dirigeants de chaque bloc s’affrontant régulièrement aux échecs par webcam interposée tout en déplaçant leurs hommes sur le terrain. Ce n’est évidemment pas un hasard si le héros porte le nom de Chess (« échecs » en anglais) et si le titre choisi pour ce tome est « Tu n’es qu’un pion ».
Dans le cas de Chess, le pion sera certainement appelé à se rebeller. Ce héros désabusé à la carapace froide et dure n’est pas pour l’instant des plus sympathiques même si on imagine qu’il cache en lui quelque humanité ou blessures secrètes qui le rendront plus attachant au fil du temps. L’apparition d’un jeune garçon à ses côtés devrait d’ailleurs l’y aider. De cet enfant, apparemment d’une importance capitale pour l’humanité, on ne saura quasi rien dans ce premier opus. Et il faudra avoir accès au dossier de presse de l’album pour apprendre que son corps renferme en fait une molécule permettant de regénérer toute terre stérile.
Avec « Chess », les frères Ricard signent donc un scénario d’anticipation d’un tout autre genre que leur BD autobiographique « Clichés Beyrouth 1990 ». En choisissant pour le dessin Michaël Minerbe, qui réalise ici sa première BD, les scénaristes ont accentué l’ambiance froide et sombre de ce monde post-astéroïde: le trait est géométrique et anguleux, les teintes en aplats plutôt austères et les ombres marquées dans des encrages qui ne sont pas sans évoquer ceux de Mike Mignola. Un univers particulier qui mérite d’être découvert, en espérant que la suite nous fournira toutes les clés à la seule lecture des planches.