Serge Le Tendre: « C’est décoiffant, avec des coups de théâtre »

Après avoir déjà adapté les vestiges de l’Aube, Serge Le Tendre s’attaque à un autre roman de David Khara. « Le projet Bleiberg » est un thriller très efficace dans la lignée du « Da Vinci Code » (même si les thèmes sont différents). Son scénariste parle de ce mystérieux projet et de la manière d’adapter un roman.

projet-bleiberg-le-tome-1-fantomes-du-passe-les.jpgVous avez déjà adapté « Les vestiges de l’Aube » de David Khara. Qu’est-ce qui vous séduit dans ses livres ?
Serge Le Tendre. D’abord les personnages parce qu’ils sont attachants et ont des faiblesses qui les rassemblent, puis l’intrigue et ses petits coups de génie. C’est assez décoiffant, avec des coups de théâtre. Enfin, il y a l’écriture de David Khara qui me met à chaque fois des images plein la tête.



N’est-ce pas parfois un peu frustrant d’adapter l’histoire d’un autre ?
S. L. T. Si cela l’était, je ne le ferai pas (sourire). J’ai débuté en travaillant pour Je Bouquine et me suis ainsi rodé à l’écriture d’adaptations de morceaux choisis de la littérature. C’est un exercice de style parfois difficile. Il faut trouver son propre rythme, ses propres marques, conserver l’esprit de l’auteur. Il faut supprimer, ajouter, édulcorer, enjoliver… Quand j’adapte un livre, c’est aussi parce qu’il y a quelque chose qui me touche dans l’histoire.

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Dans « Le projet Bleiberg », quel est ce thème qui vous a touché ?
S. L. T. Un destin réalisé. C’est ce que j’ai exploré dans « La Quête de l’oiseau du temps », « Les errances de Julius Antoine », « La gloire d’Héra » ou « Tirésias ». Un personnage qui a le potentiel d’être héroïque, mais qui ne s’est pas révélé à cause d’un empêchement majeur : une faute commise, une malédiction venue d’ailleurs, un défaut de caractère… Le récit est là pour illuminer le trajet de ce personnage, quitte à ce que la fin soit encore plus tragique que le début.



Les adaptations sont parfois décevantes parce qu’elles oublient certaines trames secondaires. Il était important pour vous d’avoir trois tomes pour tout raconter ?
S. L. T. Cela n’aurait aucun sens de réduire ce livre à un seul tome. On ne s’attacherait pas aux personnages, l’intrigue dominerait et les personnages ne seraient que des marionnettes fantômes. Avec trois tomes, ce sera équilibré et chacun d’entre eux aura sa propre cohérence narrative. Il faut cependant essayer de faire des césures un peu malignes pour créer des sortes de cliffhangers, qui ne sont pas dans le roman.



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Qu’est-ce qui est difficile dans ce type d’adaptation ?
S. L. T. C’est de conclure le premier tome avec une sorte d’inventaire. Lorsqu’on commence le deuxième puis le troisième, il faut aussi trouver des astuces qui remémorent les évènements au lecteur. 



« Le projet Bleiberg » est un thriller très efficace avec des agents de la CIA, du Mossad, mais aussi des nazis. On est presque dans le blockbuster américain…
S. L. T. C’est bien ficelé, sans temps mort et cela ferait une très bonne adaptation au cinéma, mais ce n’est pas cela qui m’a accroché. J’ai essayé de garder ce rythme, mais ce qui m’intéressait était la relation entre les personnages et le mystère du projet Bleiberg. Quand on arrivera à la conclusion du troisième tome, ce sera un sacré coup de théâtre.

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Il est aussi question de recherches menées par Himmler pour créer des surhommes. Ce lien avec l’Histoire est important dans ce genre de récit ?
S. L. T. C’est un support. On sait que Mengele a commis des atrocités et on n’en connait surement qu’une infime partie. Il y avait une telle folie, une telle démesure, une telle distorsion du réel que ça soulève à la fois du dégout et offre en même temps un tremplin pour créer des histoires. Himmler ou Hitler sont des alibis utilisés par le consortium. On se rendra compte au fil du temps que ce qu’ils étaient en train de créer est toujours d’actualité. 


Ce livre fait partie d’une trilogie qui comprend « Le projet Shiro » et « Le projet Morgenstern ». Vous avez envie de les adapter également ?
S. L. T. On va attendre tranquillement les résultats commerciaux des trois livres du « Projet Bleiberg ». S’il y a une possibilité de continuer, cela m’embêterait que cela soit quelqu’un d’autre qui le fasse, car je me suis attaché à cette histoire et à ses personnages.

Propos recueillis par Emmanuel Lafrogne

(sur Twitter)

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Le projet Bleiberg, tome 1. Fantômes du passé » de F. Peynet et Serge Le Tendre. Dargaud. 13,99 euros.

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