Caloucalou: « Des journalistes qui font n’importe quoi »


Avec « Scoop », Caloucalou s’amuse des dérives du journalisme. Son désopilant duo de reporters ne respecte aucune déontologie et flirte bien souvent avec l’humour potache de Groland.

Est-ce que « Scoop » est une réaction à une overdose d’ »Enquête exclusive »?
Caloucalou. Pas directement. Plutôt des chaînes d’info en continu en fait. J’avais commencé à réfléchir à un duo de journalistes, simplement parce que ça me permettait de les envoyer un peu partout et de traiter des sujets variés. Et puis au moment des attentats de 2015, il y a eu cette histoire de BFM TV qui a divulgué des infos sur des otages cachés. Le traitement des attentats dans son ensemble avait fait débat. Des journalistes qui font n’importe quoi : je me suis dit que je pourrai bien m’amuser avec ça.



Cette émission ou d’autres ont aussi été des sources d’inspiration ?
C. 
Pas cette émission en particulier, mais tout ce qui touche à l’info en fait. J’ai effectivement pensé à ce type d’émissions qui font dans le sensationnel et qui n’hésitent pas à bidonner leurs reportages, mais également les JT ou des émissions plus sérieuses comme « Envoyé spécial » ou « Cash investigation ». Et puis « 30 millions d’amis » un peu (sourire).

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On peut aussi y voir un petit côté Groland, non ?
C. Oui c’est possible. En tout cas j’aime beaucoup Groland.



Est-ce compliqué d’écrire des gags absurdes comme par exemple lorsque vous mentionnez cette boutique de bricolage bio ?
C. Pour moi, c’est compliqué d’écrire, ça ne vient pas facilement, je dois vraiment me forcer donc ça peut même être assez douloureux. Je peux avoir une idée globale de mon gag relativement rapidement, mais mettre des heures à l’écrire, à choisir les mots, trouver le rythme. Et puis tant que le gag n’est pas entièrement dessiné, il peut encore bouger. Je suis rarement vraiment sûr de mon coup. Je pense que je manque encore de pratique, tout cela est assez mystérieux. Si j’arrive à un résultat qui me plait après avoir tourné le gag dans tous les sens, c’est comme si un miracle s’était produit. Et là, c’est plutôt agréable.

Est-ce que vous fixez des limites à l’absurdité ?
C. Je ne fixe pas vraiment de limite à l’absurdité, mais j’ai quand même envie que ça reste accessible. Après si ça me fait rire, j’ose espérer que je ne serai pas tout seul.

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Vous mettez en scène un journaliste accompagné de son chien. Est-ce un clin d’œil à Tintin ?
C. En fait, le chien est également journaliste. C’est une équipe. Dans mes premières recherches, c’était un humain, mais il manquait quelque chose, je le trouvais un peu fade. Avec une tête de chien, c’est plus rigolo. J’étais content quand j’ai eu cette idée. Le clin d’œil à Tintin, j’y ai pensé, mais plus après coup je crois. Ça ne me déplait pas ! Mais je ne sais plus trop, ça commence à dater un peu.

On sait peu de choses sur vos deux « héros ». Il me semble que vous ne dévoilez même pas leurs noms. C’est un choix assez rare ?
C. Effectivement je ne dévoile pas leurs noms. J’ai hésité, mais je n’en ai pas vraiment eu besoin dans mon écriture, et je n’étais pas à l’aise avec le nom initial du chien, donc ça m’arrangeait d’avancer sans les nommer. Voici donc une info exclusive : le garçon s’appelle Sylvie et le chien s’appelle finalement Le chien. Ça s’est imposé comme une évidence ! À part ça je ne sais pas grand-chose d’eux non plus, si ce n’est qu’ils vivent dans mon appartement et que ce sont de grands professionnels.

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Comment en êtes-vous arrivé à cette teinte un peu sépia ?
C. Je voulais quelque chose d’assez simple à répéter pour ne pas passer des heures sur la couleur et avoir une certaine harmonie entre les gags. C’est arrivé un peu par accident, en faisant des essais, en bricolant. J’aime bien le côté un peu vieillot avec la trame. Au moment de faire le livre je me suis posé la question de trouver autre chose, mais ça plaisait à James en l’état, je suis donc resté là-dessus et je ne le regrette pas.

Propos recueillis par Emmanuel Lafrogne

(sur Twitter)

« Scoop » par Caloucalou. Delcourt, collection Pataquès. 12 euros.

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