Mathieu Burniat: « J’ai aimé l’effet qu’il faisait sur mon estomac »


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Fin gastronome, Mathieu Burniat envisageait d’écrire un album sur la cuisine. La lecture de la « La passion de Dodin-Bouffant » lui a offert de savoureux ingrédients. Et si les mots de Marcel Rouff lui ont ouvert l’appétit, son délicieux album de BD marche sur ses traces.

passion-dodin-bouffant-1.jpgComment avez-vous découvert le livre de Marcel Rouff ?
Mathieu Burniat. J’éprouvais depuis longtemps le désir de faire une BD sur la cuisine. Néanmoins, je ne voulais pas écrire une succession de recettes et d’anecdotes s’y rapportant… D’autres talentueux auteurs l’ont déjà fait avant moi. Je me suis donc attelé à l’écriture d’une histoire avec de véritables enjeux. Jusqu’à ce que, pendant mes recherches, je découvre le livre de Marcel Rouff. Outre le fait que j’ai été séduit par l’histoire et ses capacités d’adaptation, j’ai aimé son style et …l’effet qu’il faisait sur mon estomac.

Vous êtes un grand amateur de cuisine ?
M.B.
Disons que j’adore manger ! Et comme je ne suis pas un marmiton dans l’âme, je vais souvent au resto. Vous vous en doutez, c’est financièrement incompatible avec ma profession ! En fait, je ressemble pas mal au personnage de Dodin-Bouffant, le bide en moins (pour l’instant).

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Ce qui caractérise votre album, ce sont d’abord ces mots capables de donner l’eau à la bouche et qui sont habituellement réservés aux critiques gastronomiques. Est-ce un langage qui a été facile à apprivoiser ?
M.B.
C’était un sacré défi. J’avais envie de reprendre beaucoup de dialogues du livre original. Mais le style de Marcel Rouff est assez, disons « pompeux ». Chacune de ses phrases ressemble à un menu complet. Il m’a fallu raboter, clarifier, de manière à rendre la lecture de ma BD plus fluide. En ce qui concerne les dialogues inédits, propres au scénario de ma BD, je crois avoir été aidé par le souvenir de mes nombreuses lectures de romans historiques.

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D’un point de vue graphique, la quatrième de couverture évoque l’influence du graveur et illustrateur Honoré Daumier. Pouvez-vous en dire davantage ?
M.B.
Étant un grand amateur de Daumier, il me semblait opportun de lui rendre hommage, vu que l’histoire se déroule à son époque. De plus, son style burlesque se marie à merveille avec « La passion de Dodin-Bouffant ». Mais Daumier n’est pas le seul à m’avoir inspiré. On peut aussi citer Gus Bofa, Félicien Rops ou encore Gilbert Victor Gabriel.



Alors que les grands chefs sont aujourd’hui vénérés comme des stars, vous avez choisi de citer les « Papes » des livres de cuisine comme Brillat-Savarin ou De la Reynière. Une façon de leur rendre hommage ?
M.B. 
Bien que la lecture de ces anciens fût très amusante, je pense être davantage touché par certains de nos contemporains. À vrai dire, je voulais avant tout parler de ces personnages historiques par intérêt pédagogique. On n’a jamais autant écrit sur la cuisine, mais on n’en parle pas beaucoup dans nos livres d’histoire.

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Dans sa confrontation « gastronomique » avec le prince d’Eurasie, on peut lire une opposition entre la cuisine classique à la française et celle actuelle beaucoup plus élaborée, voire moléculaire…
M.B.
Cette confrontation oppose effectivement une vision fastueuse, ornementale de la cuisine, à celle qui prône simplicité et justesse. Cela dit, je ne suis pas certain que la cuisine actuelle soit plus élaborée que la cuisine classique à la française. Au contraire, on renoue de plus en plus avec la simplicité et la mise en valeur du produit. Et, dans le principe, la cuisine moléculaire (même si ce mot ne veut pas dire grand-chose), en faisant appel aux connaissances en chimie, ne s’oppose pas à ces critères. Pour ma part, je suis ouvert à tous les types de cuisine, pourvu qu’elles soient sincères, goûteuses et réalisées avec passion.

Propos recueillis par Emmanuel Lafrogne

(sur Twitter)

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« La passion de Dodin-Bouffant » de Mathieu Burniat. Dargaud. 17,95 euros.

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