Louis Alloing: « La même famille graphique que Jacobs »


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Pour dessiner « La marque Jacbos » qui raconte la vie du créateur de « Black & Mortimer », Louis Alloing a d’abord essayé de s’éloigner de la ligne claire de l’école de Bruxelles. Pour finalement y revenir et offrir un bel hommage à l’un de ses maitres.

Jacobs est-il l’un de vos auteurs préférés ?
Louis Alloing. Jacobs fait partie de ces auteurs, tels Hergé, Franquin, Tillieux ou Giraud, que j’ai encore du plaisir à relire régulièrement. Une sorte de socle culturel de la BD. Je vois deux périodes dans le dessin de Jacobs. Celle qui va du « Secret de l’Espadon » jusqu’à « L’énigme de l’Atlantide » avec beaucoup de cases par planches, des personnages surtout en pied ou au maximum en plan moyen. Celle d’un charme suranné que je préfère, et puis pour les autres albums une inspiration plus « cinématographique » avec beaucoup de gros plans dans laquelle je trouve que son dessin a un peu tendance à se rigidifier.


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Est-ce que son œuvre a rejailli sur votre travail de dessinateur ?
L.A. Dans la mesure où j’ai souvent adhéré à la même famille graphique que lui, oui, bien sûr. On apprend beaucoup en regardant le travail de maître comme lui. Quand on raconte l’histoire d’un dessinateur, est-ce que l’on doit essayer de se rapprocher de son style graphique ? Étant dans la même famille graphique, je savais qu’en faisant cette biographie il y aurait obligatoirement des comparaisons qui seraient faites entre son travail et le mien. Et ça n’a d’ailleurs pas manqué.

C’est pourquoi quand Rodolphe m’a proposé le sujet, j’ai présenté à l’éditeur (Thierry Joor de Delcourt) un style plus éloigné de la ligne claire, avec moins de réalisme. Et puis, chemin faisant, il y avait des impasses sur les citations graphiques dans l’album, ça ne collait pas. Difficile de représenter un Mortimer qui soit trop éloigné du vrai. Au final c’est ma ligne claire et pas celle d’un autre.

Avez-vous redécouvert son univers quand vous avez relu ses albums pour faire « La marque Jacobs »?
L.A. L’avantage des albums de Jacobs c’est qu’on n’a jamais fait le tour de tous les détails. C’est un des plaisirs que je trouve en lisant et relisant ses albums.

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Cet album nous emmène aux sources de la BD à Bruxelles. C’était un lieu et une période excitante à dessiner pour vous ?
L.A. C’est la partie du travail que j’ai le plus aimée. Bruxelles est une ville que j’adore et qui a beaucoup évolué au fil du temps. C’était amusant d’essayer de faire revivre un Bruxelles qui a en grande partie disparu.



Travailler sur des personnages réels, qui en plus vieillissent au fil des pages, est compliqué ?
L.A. Le seul petit problème que j’ai rencontré c’est de trouver de la documentation pour mes personnages quand ils étaient jeunes. Il y en a très peu pour Jacobs, mais pas du tout pour ses deux amis, les deux Jacques. Dans ce cas, on extrapole.

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Quand vous dessinez un cavalier gaulois avec le trait d’EP Jacobs à huit ans, cela vous renvoie à votre jeunesse et vos premiers dessins ? Comme lui, vous dessiniez sur les bancs de l’école ?
L.A. Oui, je ne pense pas être très original en disant que je préférais dessiner dans les marges des cahiers plutôt que de résoudre des problèmes de robinets et de baignoires à moitié remplies au milieu des pages. Et c’est vrai qu’il y a quelque chose d’émouvant à découvrir les premiers pas d’un artiste comme Jacobs.



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D’une manière générale, est-ce que dessiner la vie d’un dessinateur est quelque chose de particulier pour un dessinateur ?
L.A. Quand Rodolphe m’a proposé de travailler sur ce projet, je me suis demandé à quoi pourrait ressembler une BD sur la vie de quelqu’un qui passe les trois quarts de son temps devant une planche à dessin. L’avantage de Jacobs, c’est qu’il a eu une autre vie artistique avec l’opéra et qu’il a traversé ce dernier siècle. Il y avait donc matière à faire quelque chose d’intéressant.

Dessiner un prochain Blake et Mortimer pourrait vous intéresser ?
L.A. Ah non, je ne tiens pas à ce qu’on m’attaque en justice pour imitation du style de Juillard (rire).

Propos recueillis par Emmanuel Lafrogne

(sur Twitter)

« La marque Jacobs » par Louis Alloing et Rodolphe. Delcourt. 16,95 euros.

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