VERS LE DEMON

Jack ne pense qu’à une chose: venger la mort de son fils, dont l’assassin vient d’être libéré. Un road-movie d’aspect classique mais magnifiquement traité.

L’indien qui a passé 15 ans en prison pour le meurtre de Niels, le jeune fils de Jack, vient d’être relâché. Peu importe que les tests ADN aient finalement démontré qu’il est innocent, Jack ne supporte pas de le savoir en liberté et part sur ses traces.

« Vers le démon » est un road-movie somme toute classique dans le principe. Jack parcourt la fameuse route 66 – celle qui relie l’est à l’ouest des Etats-Unis – récupérant au passage deux voyageurs tout aussi paumés que lui: Sarah qui fuit son petit-ami violent; et Niels orphelin de père et qui porte justement le même prénom que le fils défunt du héros. Ce trio improbable va faire un bout de chemin ensemble navigant au gré des cafétérias glauques de bord de routes, des chambres d’hôtel sans âme ou à travers les grands espaces mythiques américains. « Bienvenue au pays de John Wayne, où il fait pas bon être une femme, un noir ou… un indien » lâche Sarah désabusée. On se croirait dans certains romans noirs prenant pour cadre l’Amérique profonde contemporaine.
De roman, il est d’ailleurs beaucoup question ici, De Metter ne cessant de faire référence au « Démon » de Hubert Selby Jr dans lequel un jeune cadre new-yorkais brillant voit son équilibre progressivement menacé par un démon intérieur. L’hommage de De Metter est flagrant: à travers la quête de son héros, il s’attache à décrire le mal qui ronge Jack de l’intérieur. La poursuite de l’indien libéré n’a en fait qu’un but: l’aider à révéler le démon qui est en lui et à trouver la rédemption.

Même si on sent venir le dénouement assez vite, la narration est très bien menée et l’on vibre pour les personnages. Pour soutenir le propos, l’auteur du très touchant « Le sang des Valentines » (prix du public au festival d’Angoulême 2005) use de sa technique originale à base de gouaches et couleurs directes. Les teintes utilisées sont généralement très sombres tandis que les traits eux ne font qu’accentuer une expression ou une émotion en soulignant un cerne, un rictus, un regard, etc. Tout est là pour nous mettre dans l’ambiance. Seul regret: on en saura pas davantage sur l’histoire de Sarah, toute l’intrigue étant évidemment centrée sur la quête de Jack.

Casterman

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