LE ROI CASSÉ

Le soldat Virjusse sera le dernier mort de la guerre et le héros de tout un peuple, ainsi en a décidé la Mort. Un album sur le thème de l’absurde, la spécialité de Dumontheuil.

La vie n’est qu’absurdité. Encore une fois Dumontheuil en donne la preuve en portant au pilori la guerre dans son nouvel album, « Le roi cassé ». Il y décrit une Première guerre mondiale insensée puisque même les chefs d’Etats ne savent plus qui l’a commencée. Une véritable boucherie qui écoeure même la Mort. Alors, frisant « l’overdose », celle-ci décide de changer les règles du jeu: elle va trouver les belligérants et leur demande de faire une pause en attendant la fin de la guerre qui aura lieu dans neuf mois, le 11 novembre. Elle leur fournit même le dernier mort du conflit, Simon Virjusse, le héros à choyer qui mourra quelques minutes avant l’Armistice.

Est-ce la noirceur du sujet mais les planches de ce nouvel album sont bien sombres comparées à la gaieté des couleurs directes de « Qui veut tuer l’idiot » (meilleur album au festival d’Angoulême en 1997) et à « La femme floue ». Petite déception car pour le reste on retrouve l’imagination fertile de l’auteur et tout ce qui fait son style.

Sur pas moins de 96 pages, Dumontheuil plonge donc le lecteur dans un univers complètement absurde où la stupidité, la vanité et tous nos travers bien humains sont pris en défaut. L’auteur insiste particulièrement sur les sentiments d’incompréhension, de désarroi et de peur qui assaille le soldat Virjusse transformé en héros. Le récit connaît certes quelques longueurs d’autant plus perceptibles que les cases ne sont pas grandes et les personnages bavards mais le ton est juste et l’humour fait mouche. Quant à la conclusion, elle est implacable: la mort physique n’est rien comparée à la « mort » sociale.

Casterman

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