CHEZ FRANCISQUE – Tome 1

« De la BD françââââise » bien de chez nous où les poivrots tirent à boulets rouge sur les étrangers et les gays. Un recueil de brèves de comptoir drôle et dérangeant à la fois.

Appuyé sur le zinc, un verre à la main et un coup dans le nez, le pilier de bar ne se fait pas prier pour refaire le monde et sortir des énormités plus grosses qu’une barrique de vin. « Chez Francisque » repose sur le principe du recueil de brèves de comptoir prononcées par des fachos ordinaires. Francisque, c’est le nom du bar où déblatèrent ces cocardiers clients, mais c’est aussi l’emblème du gouvernement de Vichy, représentant une hache de guerre. Il n’y a pas de hasard, chez « Francisque », les clients sont nationalistes, misogynes, racistes, antisémites et bien sûr homophobes.

Blagues douteuses et dialogues navrants se succèdent donc d’un gag à l’autre: les fumeurs passifs qui embêtent le monde, les jeunes drogués au coca et à l’ordinateur, des étrangers qu’il faut bouter hors de France, les homosexuels dont il faut se débarrasser, tout y passe. Le lecteur est semblable aux quelques clients de passage qui, dans l’album, écoutent avec consternation les « vérités » assénées par ces poivrots imbibés. Morceaux choisis: « C’est plus des pauvres qu’on a! Ils sont trop gros (…) Dans le temps, on avait des vrais pauvres! Secs comme des coups de trique, pâles comme des culs! Chétifs, malades, ils sentaient bon la misère, on avait envie de donner.. ». Ou encore « Au fond les bons bougnoules, c’est comme si c’était pas des bougnoules »

Dans « Jeunesse de France », paru également chez Fluide Glacial il y a près d’un an, Lindingre nous avait habitué à cet humour trash dans une désespérante – mais drôle – description du quotidien de deux frères crétins et glandeurs. « Chez Francisque » est sur la même ligne du politiquement incorrect, un ton plus provocateur encore.

Pour coller aux brèves de comptoirs brutes de décoffrage, Larcenet a opté pour un dessin et une mise en page tout aussi simplistes pour cet album grand format à la couverture souple. Pas de décor superflu ni de mise en couleur élaborée, les cases font dans le minimalisme: le zinc, les verres et deux personnages en grande discussion, sous une couleur dominante variant d’une planche à l’autre (du vert, du rose, du jaune mais surtout du bleu, du blanc et du rouge, allez savoir pourquoi…), et c’est tout. Une sobriété qui permet d' »apprécier » au mieux l’étendue de la bêtise humaine.

Share